Faire ou ne pas faire de canoë? H. avait d'abord dit non («je n'ai pas terminé ma livraison, j'ai encore du travail»), puis oui (en revenant de la boulangerie, celle qui est loin, près de l'église: «j'ai changé d'avis, il fait un temps à faire du canoë»), mais c'est moi qui ai alors dit non («on va faire du canoë, il sera midi, tu vas faire la sieste (NB: à cause du diabète), tu vas te mettre à travailler à cinq heures: ce n'est pas possible»).

Travail, donc; pendant ce temps je range le premier étage, je fais tourner une machine. Il y a eu un orage cette nuit, la terrasse n'est pas assez sèche pour que je termine de la passer à l'huile de lin. Coup de fil d'un camusien, il voudrait reprendre le travail sur les Eglogues, «parce que vous comprenez, on s'intéresse à RC en Amérique, on va traduire Le grand remplacement, ce serait bien d'en profiter pour faire connaître son œuvre littéraire.» Ah ben c'est sûr, les gars du Ku Klux Klan, les Eglogues, ça va les passionner. Comment faire comprendre à ces zemmouriens qu'ils me font horreur? (Je ne m'attendais pas à ça. Quand on m'avait parlé du projet, j'avais cru à un vrai désir de littérature, mais c'est juste… juste… en fait je ne sais pas ce que c'est. Du snobisme? Un désir de publicité? Je ne comprends pas.)

Messe, c'est l'Assomption tout de même.

En rentrant, je propose quelque chose qui paraissait plaisant mais qui va se révéler une grave erreur: «si on allait déjeuner à St Mammès, chez le caviste ou dans le nouveau restaurant en bord de Seine?»
Nous y allons à pied. Il est une heure de l'après-midi, c'est plein, idéalement placé en bord de Seine. Nous reconnaissons le propriétaire, il a un restaurant à Moret, plutôt style raclette: «nous l'avons fermé en juillet août». Spritz à la mandarine, discussion avec nos voisins qui ont abordé en canoë au pied du restaurant.

Il faut rentrer. H. titube, ne se sent pas bien. Elevée à la campagne, je demeure persuadée qu'une bonne promenade aide à digérer. Mais il ne va vraiment pas bien, je suis inquiète (sans le montrer) et je me sens vaguement coupable (moi et mes idées). Nous nous arrêtons le long du Loing sur une aire de pique-nique pour qu'il se repose et moi-même je m'endors dix minutes. Le spritz était fort.
Nous rentrons.
Dans l'après-midi j'étudie Les âmes baltes. Histoire de Romain Gary. Je me mets au repassage, termine Night onEarth, regarde Mystery Train. Comme c'est étrange, voilà un film que je suis allée voir deux ou trois fois au cinéma, quand le Champo faisait des rétrospectives Jarmusch. J'y retournais car j'étais si fatiguée que je m'endormais au milieu et ratais la fin. Aujourd'hui je me rends compte qu'en fait, je n'en avais jamais vu plus que les dix premières minutes. En réalité je dormais toute la séance, et non quelques minutes.

Soudain dans la soirée, H. s'exclame: «J'ai oublié de me piquer hier! [à l'ozempic]. C'est pour ça que je me suis senti si mal cet après-midi!»
C'est la deuxième fois que ça arrive. Autrefois, Gvgvsse terminait certains de ses billets par: «toujours les mêmes erreurs». Que devrions-nous dire. Il faut que je mette en place des procédures, des pare-feux. Jusqu'ici je m'étais refusée à le faire, arguant que chacun est responsable de lui-même, mais finalement, puisque cela a des conséquences sur ma vie, autant le prendre en compte.
Je programme sur mon téléphone une alerte tous les lundis soirs.