Je suis totalement rassurée: il est facile de voyager avec O. Nous avons la même condition physique, la même résistance à la fatigue, le même mépris du temps (météo), le même amour de la voiture décapotée. Et il ne râle pas si je perds un quart d'heure sur Candy Crush! (smiley confus)

Visite du Mont-Saint-Michel, une demi-heure trop tard pour éviter la cohue. La visite que j'aurais souhaité faire, la visite "approfondie" qui permet d'accéder à Notre-Dame-sous-terre, n'a lieu que le week-end et jours fériés. J'explique à O. le développement de l'ensemble, comme en spirale autour du rocher avec construction de renforts sous certaines salles pour leur assurer une assise (la fantastique salle des gros piliers est la plus représentative, mais elle n'est pas la seule). Il est mal à l'aise, il paraît faire une quasi-phobie face à la foule.
Programme pour les vingt ans à venir: j'achète Abbayes et monastères de France, ne serait-ce que pour avoir une liste facile à consulter.

Pourquoi, au pied d'endroits comme le Mont-St-Michel, rien ne prévient les personnes qui ont du mal à marcher et les couples avec poussette qu'il vaudrait mieux ne pas monter? (La jeune femme croisée portant la poussette à bout de bras et déjà épuisée au bout d'une volée de marches… mais hier aussi, sur l'île de Tatihou, des personnes qui n'auraient sans doute pas dû venir jusque là. On dirait que l'idée d'adapter ses sorties à ses contraintes et ses moyens a totalement disparu. J'ai l'impression d'une société devenue capricieuse, au sens où les enfants sont capricieux: la raison sommée de plier devant le désir.)
Il y a une majorité d'étrangers, souvent sportifs, avec des enfants d'une dizaine d'années.

Il s'est remis à pleuvoir. L'appli météo du téléphone ce matin indiquait trois jours de pluie (jusqu'à samedi), je décide d'investir dans un ciré — rouge et pas jaune (jaune c'était pour la chanson de Renaud, rouge c'est pour mon total look aviron de Neuilly).
Bientôt il s'arrête de pleuvoir.
Direction Saint-Malo à nouveau par "le chemin le plus court" et les routes minuscules au son de la musique du Grand hôtel Budapest. Nous rejoignons tangentiellement la côte. Crêpe au Vivier-sur-Mer. Le cuisinier-serveur(-propriétaire?) est charmant. Un couple franco-italien s'installe avec ses garçons blonds d'une dizaine d'années qui chipotent sur un peu tout et réclament du Nutella (mot qui ne nécessite pas de traduction), tant et si bien qu'O. se penche vers moi et murmure: «Qu'on me donne leur assiette!»
Et un instant j'imagine la tête des mômes s'il se retourne et leur prend leur assiette en disant: «moi, je vais le manger».

Saint Malo. J'aurais dû acheter un ciré plus tôt car bien entendu il ne pleut plus (suis-je bête: c'était pourtant évident). Remparts. Marée basse, la plage est tentante, nous contemplons des ados qui s'amusent dans une piscine qui s'emplit et se renouvelle avec la marée (cela me rappelle le cinquième tome des Filles de Malory School. Ce genre de piscine m'avait fait rêver.) Centre de la ville. Deux enfants de dix ans à deux moments différents se font très sérieusement remonter les bretelles par leur mère. Scènes intemporelles entre La gloire de mon père et La guerre des boutons. (Tout n'est pas perdu, tout ne s'est pas perdu.) Errance en s'éloignant de la foule, rues les plus anciennes avec façade en bois, médaillons de Jacques Cartier et de sa femme, maison natale de Chateaubriand (le panneau devant l'hôtel le cite: «je suis né dans une chambre face à la mer» et cite la rectification de sa sœur: «la chambre de notre mère donnait sur la rue». Mais qu'importe? La femme de Chateaubriand a écrit ses propres souvenirs qui eux non plus ne coïncident pas toujours avec ceux de l'illustre…)

Nous reprenons la voiture. Il fait si beau que nous pouvons décapoter. Nous gagnons Saint-Brieuc par "la route des tracteurs".