Temps magnifique ce matin, gelée blanche sur le ponton.

Seine au lever du soleil l'hiver à Samois


Belle sortie en huit, même si Pascal ne nous suit pas : il y a eu un problème de bateau-moteur, il a dû rentrer au club pour laisser le sien à la personne qui encadre les scolaires.

J’apprends avec perplexité que finalement les deux quatre mixtes envisagés pour les Championnats de France sont maintenus: il s’agit de l’équipage du huit coupé en deux. Mais comme Nathalie ne veut pas ramer en couple, la place m’est proposée (je soupçonne Nathalie de se désister volontairement car elle ne peut concevoir que j’aille à Mâcon uniquement pour barrer).
— Mais on ne s’est jamais entraîné ensemble!
— C’est pas grave, on fera au mieux.
Je les regarde sans comprendre. Je pense au CNF, aux entraînements forcenés, au niveau des filles qui montaient en masters. Nous allons nous ridiculiser. Cela n’a pas l’air de les effleurer. Se pourraient-ils qu’ils aient raison et que j’ai tort?

J’avais l’intention de monter jusqu’à Champeaux l’après-midi. Je l’ai fait, mais tardivement, m’étant profondément endormie après le déjeuner.

Vernou-la-Celle cherche un médecin et l’a écrit en grosses lettres sur une banderoles devant l’église, forêts, routes où l’on se croise avec difficulté, un air de Sologne qui me réjouit. Je colle à Echouboulains, le cœur palpitant puisque nous sommes prévenus qu’il ne faut pas faire cela seul, que c’est dangereux (ce que je crois et cependant peine à croire: nous sommes en France, non d’un petit bonhomme. Remontent de vieux souvenirs d’informations à la radio (Europe 1), de bagarres entre colleurs d’affiche, les premières images d’Adieu poulet).

La nuit tombe. La forêt laisse progressivement place à la Brie, coucher de soleil sur les labours, et c’est la Beauce qui remonte de mon enfance.

Coucher de soleil sur la plaine au sortir d’Echouboulais


Chaque village a sa belle demeure, sa ferme fortifiée ou son château. Je comprends pourquoi la circo vote à droite, je repense à cet ancien collègue qui m’expliquait pourquoi il y avait tant de particules chez les agents d’assurance: «après la guerre, M. le comte devenait agent d’assurance; il allait voir les paysans autour de chez lui qui tous souscrivaient quand M. le comte le demandait». L’histoire passe lentement. Terres agricoles et peur des partageux, villes industrielles et haine des patrons. Sociologie à l’emporte-pièce pas entièrement dénuée de fondement.

Il fait nuit désormais. Château de Bombon. Je cherche des panneaux à l’école, la mairie, l’église. Je ne trouve qu’une boîte à livres contenant La valise en carton de Linda de Suza et La France en automobile d’Edith Wharton. J’emporte ce dernier livre en pensant à Aline qui m’en avait parlé pendant que nous visitions Maintenon.

Champeaux. Trop tard pour l’abbatiale. France Inter dévide la vie de Philippe Seguin, son refus de Maastricht au moment où Mitterrand se sert de sa maladie pour emporter le oui. 1992. Je me souviens de discussions sur la terrasse, ma mère anti-européenne. Était-ce à cette occasion, ou plus tard en 2006, qu’un ami m’avait dit: «si les Etats-Unis sont contre, c’est que cela ne peut pas être mauvais pour nous». Je ne m’étais pas rendu compte à l’époque à quel point c’était bien évidemment lié à 1989 et la chute du mur. Je vais avoir une heure de retard sur ce que j’avais promis à H.
Je colle à Sivry-Courty, à Veneux en passant devant la place et je rentre.